Le Maître de Flore : le nom même de l’artiste fait rêver. Il désigne un peintre dont l’identité s’est perdue mais dont l’œuvre extrêmement rare « représente à la perfection le style et l’esprit de la première école de Fontainebleau », mais d’une école de Fontainebleau déjà parvenue, dans les années 1550, à la maturité grâce à Primatice et Niccolò Dell’Abate. Très certainement italien comme eux, le Maître de Flore manifeste dans son art tout ce qui fait la séduction de cette forme du maniérisme ultramontain en France : un goût prononcé pour les thèmes mythologiques complexes et érotisés, une propension à l’élégance vive et voluptueuse, une prédilection pour la représentation de nus élancés ou vigoureux, un net penchant pour l’héroïsation de la femme par la grâce. Le dessin offert par les Amis du Louvre représentant Vénus couronnée par un satyre en présence de l’Amour, des Grâces et de l’Abondance, égale en beauté l’admirable Céphale et Procris de la collection Seligman acheté par la Pierpont Morgan Library, à New York, en 1978. Il offre le modèle d’une œuvre qui fut certainement très remarquée et très tôt appréciée. Dans la première moitié du XVIIème siècle, ce dessin fit partie du fameux cabinet de François de La Noüe, collectionneurs des dessins de l’école de Fontainebleau. Sans cet amateur si clairvoyant, peut-être ne pourrions-nous plus goûter aujourd’hui cet art d’exception où la légèreté de la fable s’appuie sur le privilège aristocratique du style, un art qui joue, en l’outrepassant, avec celui des maîtres du premier XVIème siècle italien.